dimanche 20 avril 2008

La Banque d'Angleterre pourrait reprendre 50 milliards de livres de crédits immobiliers

Elle soulagerait ainsi les banques, écrasées par le poids de ces créances, et redonnerait indirectement de l'oxygène aux "building societies". La banque centrale avait été critiquée pour avoir trop peu soutenu les établissement bancaires au début de la crise financière.
La Banque d'Angleterre (BoE) annoncera la semaine prochaine un plan de 50 milliards de livres (63 milliards d'euros) visant à dénouer la crise du crédit immobilier, a indiqué samedi la BBC.

La banque centrale va racheter aux établissements financiers britanniques pour 50 milliards de livres de crédits immobiliers et les échanger en obligations d'Etat d'une durée d'un an avec possibilité de les proroger jusqu'à un maximum de trois ans, précise la BBC sans indiquer ses sources. Le projet avait déjà été annoncé dans la presse, mais le montant n'était pas connu. Si le chiffre de 50 milliards était confirmé, il s'agirait de la plus importante initiative du genre dans l'histoire du pays, selon la BBC.

L'opération vise à desserrer les conditions du crédit dans le pays, rendues difficiles en raison de la crise des prêts hypothécaires à risque ("subprime") aux Etats-Unis. La BoE espère que cette injection d'argent frais satisfera les besoins des établissements, assouplissant les conditions de crédit entre eux puis envers les particuliers. Le choix d'obligations sur un an permet par ailleurs au gouvernement de ne pas devoir inclure ce rachat de crédits dans sa dette publique, à la différence des titres portant échéance sur plus d'un an.

Le "swap" (échange de dettes ou de créances) entre les banques et la BoE vient également compenser l'effondrement, en août, du marché des obligations adossées à des prêts hypothécaires. Ce dernier avait permis aux établissements britanniques de lever 60 milliards de livres sur le premier semestre 2007. Sa disparition les a ainsi privé d'une importante source de financement, provoquant la hausse du coût du crédit.

Le plan de la BoE répond aux pressions du Trésor en vue d'une opération d'envergure visant à empêcher que la crise financière ne se transforme en véritable récession. La Banque d'Angleterre s'était vu reprocher l'an dernier par une partie des milieux d'affaires et politiques de ne pas avoir suffisamment aidé les banques britanniques engluées dans la crise du crédit, alors que ses homologues comme la Réserve fédérale américaine (Fed) et la Banque centrale européenne (BCE) injectaient des centaines de milliards de dollars dans leurs circuits bancaires respectifs. Aux Etats-Unis, l'administration Bush est mobilisée : elle a décidé un plan de relance qui va se traduire par l'envoi d'un chèque à chaque foyer américain, et la Fed a piloté le rachat de la banque Bear Stearns en déroute par sa rivale JP Morgan.

La BoE a commencé à virer sa cuti, et s'est montrée de plus en plus interventionniste. Elle a dû sauver la banque spécialisée dans les crédits immobiliers Northern Rock, qui après avoir été recapitalisée a été nationalisée. Depuis décembre, elle a abaissé son principal taux directeur à trois reprise : il est tombé de 5,75% à 5%.

En Grande-Bretagne, les grandes banques ont enregistré d'importantes dépréciations, HSBC et RBS en tête. Cette dernière pourrait annoncer 4 milliards de livres de dépréciations supplémentaires et le lancement d'une augmentation de capital. Mais la situation est particulièrement délicate pour des dizaines de petites "building societies", des sociétés mutualistes d'épargne qui ont un accès plus restreint au marché que les grandes banques, comme a permis de le souligner une réunion tenue mardi entre le Premier ministre Gordon Brown et les patrons de banques britanniques. Les "building societies", qui ont accordé 47% des crédits immobiliers britanniques l'an dernier, ne pourront pas bénéficier directement du plan de la BoE, mais cette dernière espère que l'injection d'argent permettra d'abaisser le taux interbancaire et d'ainsi assouplir les conditions générales du crédit.

samedi 12 avril 2008

Selon la Banque de France, les crédits aux entreprises restent dynamiques

La production de crédits aux entreprises a atteint 306,9 milliards d'euros en février, repartant à la hausse depuis décembre. Un constat qui laisse les trésoriers et certaines banques quelque peu perplexes.

La hausse est particulièrement notable sur les crédits à plus d'un an.
Haro sur le « credit crunch ». Le mot est banni. Hier encore, Jean-Claude Trichet, le gouverneur de la Banque centrale européenne, a assuré qu'il n'y avait pas de « signes significatifs de difficulté au niveau de l'offre de crédits bancaires aux ménages et aux entreprises non financières », même si « les banques durcissent les conditions de crédit ». La France en est un bon exemple. Les crédits aux entreprises, après un tassement en décembre à 299,9 milliards d'euros accordés, y connaissent un regain. De 302,7 milliards d'euros en janvier, la production a encore crû, à 306,9 milliards en février. La hausse est particulièrement notable sur les crédits à plus d'un an.

Pour les entreprises et quelques banquiers de grandes entreprises au quotidien, ce constat laisse cependant « perplexe ». « Il y a beaucoup plus de réticence qu'avant pour prêter », indique le directeur financier d'une entreprise du CAC 40. Cette hausse pourrait ainsi s'expliquer par de nombreux facteurs « techniques » : les grosses acquisitions de type Lafarge ou l'achat pour 5,6 milliards d'euros d'Absolut par Pernod Ricard viennent gonfler les chiffres. Ensuite, « cela peut refléter simplement le tirage de lignes ouvertes par le passé et non pas le bouclage de nouveaux crédits syndiqués ou bilatéraux », indique Olivier Talvard, directeur du développement chez Bfinance. De fait, aujourd'hui constate-t-il, « les opérations qui se finançaient avec trois ou quatre banques en requièrent au moins six ou sept et les simples crédits de confort sont mal vus par les banques ». Certains banquiers, reconnaissant aussi que la hausse de la production peut paraître surprenante, évoquent, pour l'expliquer, l'absence encore de décision au sommet des banques pour restreindre les volumes, ou un effet du décalage entre les décisions de la direction et les objectifs des commerciaux sur le terrain.

Changement de braquet
Pour les PME, en revanche, les banquiers sont unanimes. « La demande reste forte sur le marché des PME et TPE, en particulier en transmission d'entreprise, et notre distribution de crédit demeure soutenue », indique Patrick Jansen, directeur du marché des entreprises à la Société Générale. Même son de cloche au Groupe Banque Populaire : « L'an dernier, nous avons réalisé 13,8 milliards d'euros de crédits nouveaux, soit 11 % de plus qu'en 2006, et même +12,5 % sur le second semestre, au coeur de la crise. Depuis le début de l'année, rien ne vient démentir cette tendance », insiste Olivier Robert, responsable du financement des entreprises à la Banque Fédérale.

Pour autant, les PME ressentent un changement de braquet sensible. Un trésorier d'une PME de matériaux de construction constate ainsi que si rien n'a bougé du côté de ses partenaires historiques, « pour la première fois, d'autres nous ont demandé d'arbitrer entre des lignes de couverture de change et de matières premières ». Les banques prennent des gants.